
Au seuil de l’embrasement
Du 6 septembre au 4 octobre 2025
Peintures, aquarelles, monotypes
Le paysage comme sujet : entre renouveau et déclin
De retour d’une résidence artistique passée sur les rives du lac de Lugano, l’artiste – originaire de La Chaux-de-Fonds – trouve dans l’étendue d’eau et les jeux de lumières qui s’y reflètent un nouveau champ d’expérimentation. Inspirée par cette immersion, Anne Pantillon propose deux nouvelles séries d’œuvres : l’une, aux tonalités verdoyantes, explore les effets de la lumière printanière sur la surface du lac de Lugano ; l’autre, aux couleurs plus éclatantes, saisit les teintes changeantes et délicates du crépuscule sur le lac Léman. Tout en proposant une réflexion plastique sur la lumière et ses effets sur l’eau, l’artiste associe à ses œuvres une fonction plus métaphorique, voire poétique : pour elle, ces deux séries constituent « le reflet d’une même médaille » – deux instants suspendus où la lumière oscille entre brillance et crépuscule, entre renouveau et disparition, où les formes se devinent dans l’exaltation des couleurs, dernier éclat avant la tombée de la nuit. Éternellement changeants, à la limite de l’indicible, l’eau et ses reflets – véritable miroir de lumière – offrent à l’artiste un potentiel créatif et expressif infini.
À la croisée des techniques : aquarelle, monotype et peinture acrylique
Dans ses aquarelles, Anne Pantillon privilégie les petits formats, qui, selon elle, favorisent la projection de sa pensée et l’expérimentation des couleurs, de leurs relations, ainsi que de leur matérialité. Résultat d’un geste spontané, l’aquarelle devient le lieu de l’imagination, du rêve et de la recomposition mentale. Parce que oui, aussi réalistes qu’apparaissent ses paysages, l’artiste privilégie la création en atelier, celui-ci se prêtant davantage au travail de synthèse des différentes atmosphères contemplées.
Pour ce qu’il en est des monotypes – procédés d’impression où une peinture sur verre ou cuir est reportée par pression sur papier –, c’est aussi la spontanéité qui prévaut : cette technique se fait d’un jet et ne laisse que peu de place à la retouche. Il y a dans le monotype quelque chose de très paysagesque, puisque, tout comme les reflets de lumière, le monotype n’advient que dans la brièveté de l’instant.
La peinture acrylique, enfin, par la superposition de couches successives et l’emploi de formats plus grands, s’inscrit dans la durée. En ce sens, la peinture constitue en elle-même un acte contemplatif, analogue à l’observation des paysages et de leurs atmosphères.
Le paysage au seuil du regard : un rapport particulier
Il ne faut pas se méprendre. Bien que l’artiste propose ici diverses déclinaisons de paysages lacustres, ceux-ci ne constituent pas sa seule ambition. Loin de se limiter à une seule étude de la lumière et de ses effets sur les plans d’eau, Anne Pantillon s’intéresse surtout à notre intégration au sein du paysage – nous, observateurs quotidiens, qui, face aux œuvres, devenons spectateur. Pour preuve, la présence humaine imprègne systématiquement ses compositions. Il s’agit, le plus souvent, de détails subtils – une barrière, le cadre d’une fenêtre ou la silhouette d’une maison – qui suggèrent la position de l’observateur. Que ce soit de grands formats ou de plus petits, tous agissent avec une même force : tous inscrivent le regard du spectateur dans le paysage pictural et l’obligent à se déplacer – en prenant du recul ou en se rapprochant – pour en saisir à la fois la totalité et les détails. La surface picturale s’impose au spectateur, à l’instar du paysage qui le domine.
« Il y a, explique l’artiste, une forme de vertige dans le fait de signifier la présence de l’humain face au paysage ; la possibilité de nous remettre face à notre juste dimension par rapport à lui ».